1290.010. Mgr François Poirier: Arrêté d’expulsion

Classification Religions et Croyances

Né le 2 Novembre 1904 en France, François Poirier, qui exerçait son ministère en Bretagne après avoir été curé de la cathédrale de Port-au-Prince, fut appelé en 1955 par le président Paul Eugène Magloire à la tête de l’archevêché de Port-au-Prince devenant ainsi le 7ème prélat à occuper cette fonction depuis la signature du Concordat en 1860.

L’archevêché qu’il est appelé à diriger fait partie d’une église très influente dans les différentes sphères de la société haïtienne, proche des classes possédantes et dont les membres à majorité française méconnaissaient la réalité haïtienne. Il essaya de maintenir le statu quo. Prenant parti pour les étudiants qui avaient décrété une grève en automne de l’année 1960, il fut déclaré « persona non grata » aux menées subversives et expulsé en  novembre 1960. Le décret suivant au ton très laconique légalise l’expulsion. Les vrais motifs de cette expulsion se trouvent toutefois dans les Mémoires d’un leader ou l’auteur rapporte que l’archevêque Poirier, ami intime de Magloire et proche du candidat Louis Déjoie, se comporta en adversaire farouche durant la campagne électorale.

Ce fut ensuite le tour de Mgr. Rémy Augustin, auxiliaire de l’archidiocèse de Port-au-Prince et de l’ordinaire des Gonaives, Mgr. Paul Robert.

Alors que Mgr Augustin revint en Haiti en 1966, Mgr. François Poirier ne foula jamais plus les terres d’Haiti. Il dut soumettre sa démission en août 1966 pour faciliter la nomination de son successeur, Mgr François Ligondé.

Texte du Décret

Vu l’article 90 de la Constitution;

Vu le Décret-Loi du 19 novembre 1936; [Note: Loi interdisant le parti communiste haitien]

Vu la Loi du 29 février 1948;

Vu la Loi du 19 septembre 1953 sur l’immigration et l’émigration;

Considérant que le Droit d’expulsion est un attribut de la souveraineté d’État;

Considérant que chaque État, dans les limites de son territoire, édicte des mesures garantissant sa sûreté intérieure et extérieure; qu’en conséquence il a le droit d’expulser tout étranger dont les menées sur le sol national sont de nature à compromettre cette sécurité, parce que subversives de l’ordre social ou politique établi;

Considérant que le devoir du Gouvernement haïtien de garantir à l’intérieur le maintien de l’ordre et la sécurité des familles se double encore de celui d’assurer la sauvegarde de l’ordre continental américain;

Considérant que Monseigneur François Poirier, de nationalité française, est indésirable;

Sur le rapport du Secrétaire d’État de l’intérieur;

ARRÊTE::

Article 1er:

Monseigneur François Poirier. de nationalité française, est expulsé du territoire d’Haiti.

Article 2:

Il sera embarqué par la première occasion en partance pour l’étranger.

Article 3:

Le présent arrêté sera publié et exécuté à la diligence du Secrétaire d’État de l’intérieur.

Donné au Palais national, à Port-au-Prince, le 24 novembre 1960, an 157ème de l’indépendance.

Par le Président:
.- Docteur François Duvalier

Le Secrétaire d’État de l’intérieur et de la Défense nationale:
.- Docteur Aurèle Joseph.

  • Le moniteur 115è année, No. 112; Jeudi 24 Novembre 1960.
  • Duvalier, François. Mémoires d’un leader du Tiers Monde: mes négociations avec le Saint-Siège; ou, une tranche d’histoire. Paris : Hachette, 1969; pp. 307.

article-footer-nav