Discours du premier ministre a.i. Ariel Henry à l’occasion du 218è anniversaire de la Bataille de Vertières

Monsieur le Directeur de Cabinet,
Messieurs les Secrétaires Généraux,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs les Représentants des Organisations de la société civile,
Mesdames, Messieurs de la presse parlée, écrite, télévisée et en ligne,
Mesdames, Messieurs, en vos Rang, Grade et Qualité,
Chères Concitoyennes, Chers Concitoyens,
Distingué(e)s Invité(e)s,
Mesdames, Messieurs,
Frè m ak sè m yo,

Chaque année, nous avons rendez-vous avec l’histoire : 18 novembre. C’est plus qu’un devoir de mémoire. Lequel peut nous aider à mieux comprendre le présent, mais aussi et surtout à mieux préparer l’avenir. En ce 218e anniversaire de la bataille de Vertières, il est venu le temps pour nous autres Haïtiennes, Haïtiens, de refaire l’histoire sous une autre forme.

Monument de vertières
Le monument érigé à Vertières près du Cap-Haitien

Photo d’archives

La bataille de Vertières du 18 novembre 1803 est l’aboutissement de la volonté d’être libre. La victoire des troupes indigènes sur l’armée napoléonienne a ouvert la voie à l’indépendance et à la souveraineté nationale. En dépit des antagonismes qui les opposaient les uns aux autres, esclaves et affranchis, noirs et mulâtres, ont eu l’intelligence d’opter pour l’union et le Tèt ansanm.

Le général en chef de l’armée française, Rochambeau, a dů, pour la première fois de sa carrière militaire, faire face à des soldats et des généraux épris de liberté. Des combattants qui croient que l’arme la plus puissante n’était même pas la baïonnette à la pointe du fusil. Mais, de préférence, une prise de conscience collective qui conduisit au triomphe de cette journée historique, à travers le cri de guerre: « Grenadye a laso, sa ki mouri, zafè a yo ! ».
Comme en 2003, la transcendance de 1803 devrait, aujourd’hui, être le maitre mot qui guide nos actions. Nous ne pourrons jamais affronter les défis de l’heure, en grenn senk. Depuis quelque temps, j’ai fait du dialogue avec des organisations sociales et politiques, mon cheval de bataille. Cela m’a permis d’aboutir à un large consensus, à un Accord politique pour une gouvernance efficace et apaisée dont les retombées seront profitables pour toutes les filles, ainsi que tous les fils de la nation. Je persisterai dans cette démarche avec détermination et opiniâtreté. Car, je reste convaincu que cette voie, qui privilégie le dialogue et le consensus, nous conduira à bon port. Nous avons l’obligation de rééditer 1803 à cause des urgences et des problèmes auxquels fait face notre nation. Nous devons mener un combat sans merci pour parvenir à aplanirles sentiers et faire taire nos divergences en vue de continuer sur la voie de la démocratie. Pour y parvenir, nous devons transcender de nos querelles, consentir des sacrifices énormes, aller au delà de nous-même et emprunter la voie du consensus. L’un des événements importants que nous devons comprendre aujourd’hui, c’est que les officiers François Capois, Jean-acques Dessalines, Henri Christophe, entre autres, savaient que le chemin de la liberté était irréversible. Regarder en arrière serait la catastrophe. Ils ne pouvaient pas regarder en arrière. Grand était le défi.

Mes chers compatriotes,

1803 est un exemple extraordinaire d’unité nationale et de dépassement de soi. Dans l’un de mes derniers messages, j’avais souligné l’esprit de grandeur des généraux noirs et mulâtres à l’Arcahaie. Ils se sont unis pour nous donner un symbole impérissable : le drapeau national. Le 18 novembre 1803, ces mêmes généraux ont assuré la défense du territoire. I
Christophe, Capois, Gabart, Pétion dans le Sud, etc., ils ont tous travaillé à leur manière pour préparer et rendre possible ce qui devrait être la fête, le premier janvier 1804. En dépit de nombreuses contraintes, nos agents des forces de l’ordre, en l’occurrence les Forces armées d’Haïti et la Police nationale d’Haïti, restent dans la voie de leur mission. Ils savent tous que le salut de la patrie et la victoire de la démocratie passent nécessairement par le maintien de l’ordre public, le renforcement de l’unité nationale, la cohésion de l’Etat, le respect de l’autorité et de la loi. Nous leur disons merci. Il y a 218 ans, nos ancêtres nous ont donné une formidable leçon de liberté. Ils ont concentré leur énergie sous le haut commandement unifié de Dessalines, stratègeinspiré, seconde par le général Capois la mort, tacticien indomptable, pour rompre la chaîne de l’esclavagisme colonial.

Chères Concitoyennes
Chers Concitoyens

Se bon jan san ewo Vetyè ki koule nan venn nou. Nou se desandan yon ras moun, fanm ak ganson ki te konnen anpil move lavi. Yo rive kreye yon vi miyo, libète, ak dwa grandet majè nou pou limanite. Nou dwe montre ke nou menm tou nou genyen menm kalte diyite ak kokenn chenn konbatan sa yo. Yo te afwonte lanmò pou n te ka genyen jodi a yon peyi lib, ki pa rete ak moun, yon peyi ki granmoun tèt li.

Aujourd’hui, la bataille de Vertières devrait avoir un sens que si l’on se parle, discute ensemble des difficultés qui se dressent devant nous comme les nouveaux défis, les nouveaux remparts que nous devons renverser. Il y a lieu aujourd’hui, chacun de son côté, d’avoir une réflexion profonde sur l’existence et la mission de cette nation qui a mené l’une de plus grandes batailles et qui a fait de nous les pionniers dans le respect des droits de l’homme et du citoyen.

J’invite mes soeurs et mes frères à s’unir afin de construire un pays digne du rêve de nos ancêtres. Je veux insister aujourd’hui sur la nécessité d’entretenir un climat politique stable dans la perspective des prochaines élections en vue de conduire notre pays sur le chemin du développement durable. Aussi, je demande à tous mes compatriotes de placer les intérêts supérieurs de la Nation au-dessus de toute querelle de chapelle, autour d’un même objectif qui dépasse les intérêts de chacun. Haïtiennes, Haïtiens, unissons-nous. Ce n’est pas un vain mot. Donnons un sens à Vertières. Haïti a été cette lumière qui éclairait le monde pour montrer le chemin de la liberté. Nos ancêtres ont réalisé Vertières dans le tèt ansam. Vertières n’aurait jamais été possible si les notions de fraternité et d’unité n’avaient pas imprégné l’esprit des précurseurs de l’indépendance. Nous avons l’obligation devant l’Histoire de bâtir la nouvelle Haïti dont nous rêvons tous. Une Haïti unie. Une Haïti prospère. Une Haïti réconciliée avec elle-même. Une Haïti de consensus et de compromis.
Rendons un chaleureux hommage à tous les soldats de l’armée indigène. Ils nous ont laissé de belles pages d’histoire avecleurs armes, avec leur sueur, avec leur sang et avec leur bravoure! Rendons un hommage particulier à leur chef, le général Jean Jacques Dessalines, le grand stratège militaire et notre illustre libérateur.

Cette victoire du 18 novembre 1803 était le triomphe de la volonté, le triomphe du courage, le triomphe de la raison et surtout le triomphe de l’union. Cette victoire du 18 novembre 1803 était l’entrée triomphale du général Jean-Jacques Dessalines dans la légende de l’histoire militaire du monde moderne, pour avoir forcé le destin de son peuple, en le rendant libre et souverain, grâce à son intelligence et à la fureur des canons et des fusils. Cette victoire du 18 novembre était celle de la dignité humaine sur la barbarie esclavagiste. C’était le triomphe des droits de l’homme.

Mes chers compatriotes,

Pour honorer valablement la mémoire des héros de Vertières, après deux siècles perdus, il faut nous mettre debout. Debou pou nou di NON ak zak sanginè moun bezwen fè nan peyi a;

Non ak zak kidnapin Lapolis ak Lame deside kwape ak tout fos; Non ak tout moun ki bezwen kontinye mete yon klima enstabilite nan peyi a. Nap mande tout konpatriyot nou yo rete debou pou pitit nou kallekol, debou pou wout debloke, debou pou lame ak lapolis men nan men. N ap kontinye kwape move zè, debou pou Ayiti leve kanpe. Ayiti bite men n ap bal men pou li rekanpe. Grenadye alaso ! An nou lanse aso kont ensekirite, kont grangou, kont rayisab, kont divizyon, kont difamasyon, kont move akizasyon, kont mechanste, kontinflasyon, kont grangou, kont chomaj, kont tout kalite konplo lènmi Ayiti ap manniganse. La bataille de Vertières est un bel exemple de solidarité et d’union nationale. Elle ne saurait représenter, pour nous, Haïtiennes, Haïtiens, une simple histoire que l’on raconte en salle de classe. La bataille de Vertières doit être, plutôt, une lumière qui éclaire nos chemins, un exemple sur lequel nous devons modeler notre vie quotidienne ; une source d’inspiration constante dans nos projets d’avenir pour notre pays. La société libre, égalitaire, fraternelle et prospère à laquelle aspirent toutes les Haïtiennes et tous les Haïtiens vivant en Haïti et à l’étranger, réclame une nouvelle épopée à la dimension de celle de Vertières. Chacun de nous doit en constituer le fer de lance.

Portons la bataille de Vertières dans nos caurs. Affichons-la dans toutes nos actions et nos prises de décision. Réalisons chaque jour une nouvelle bataille de Vertières pour rendre notre peuple plus uni, plus heureux et plus solidaire. Frè m ak sè m isit tankou lòt bò, Nous avons fait l’histoire en devenant la première République noire et indépendante du monde. En réalisant l’abolition de l’esclavage, nous avons étonné la terre entière.

Nos ancêtres ont fait Vertières. Il incombe à notre génération la noble tâche de construire l’Haïti de demain. Nous devons être pénétrés de cet esprit de dépassement qui émane de la bataille de Vertières. Le destin fait que nous sommes à la fois les témoins de l’effondrement de nos institutions et artisans de leur reconstruction. Puissions-nous, à l’instar de nos ancêtres répondre à ce pressent appel, à ce nouveau rendez-vous avec l’Histoire.

Merci,

Dr. Ariel Henry
Premier ministre a.i. d’Haiti